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18 décembre 2013 3 18 /12 /décembre /2013 14:54

Ce matin, alors que tu faisais rouler dans la paume de ta main quelque rotondité laiteuse et satinée, – ou n'était-ce pas plutôt en agrippant ton manche hardiment à deux mains (fermement mais avec douceur, un peu comme on retient entre ses doigts un oisillon tombé du nid, l'empêchant de s'échapper et de se blesser à nouveau), concentré sur le mouvement de torsion souple et dur à la fois que tu allais incontinent devoir imposer à ton corps ? Bref, ce matin, en t'adonnant aux délices du golf, tes pensées ont, une fois de plus, dérivé vers des contrées reculées ; et tu t'es alors pris à rêver à ce qui, selon toi, pourrait constituer une vie idéale.

D'une manière assez surprenante, elle ne serait finalement pas très différente de celle que tu as. On pourrait dire, tout bien considéré, que, par exemple, tes enfants te conviennent. Un malheureux employé de télédémarchage t'a proposé l'autre jour d'échanger l'un d'eux contre un IPhone© 5S©, et tu as refusé ; c'est dire ! Tu ne dis pas que, si tu en avais le pouvoir, tu ne changerais pas tel ou tel trait de caractère, mais après tout personne n’est parfait. Il en va de même pour la personne qui partage ta vie (faire ici la courte liste de quelques volumes à modifier serait certainement assez mal vu), et de ton lieu d’habitation – un bon lit, une paire de baffles de bonne qualité et une connexion à haut débit suffisant à ton bonheur.

En fait, le seul changement notable qui t’amènerait vers ta vie idéale serait l’absence de travail.

Entendons-nous bien : tu ne rechignes pas au travail, tu as même la vague impression de comprendre que le travail est indispensable à notre évolution dans la société ; il t’es juste impossible de concevoir que certaines personnes préfèrent aller travailler que, par exemple, rester au lit – ou même se lever et rester dans son salon. En ce qui te concerne, un travail acceptable serait celui décrit par le grand Stephen King (au passage, tu te dois de préciser à son propos que son prénom se prononce « Steven », et que, contrairement à tous les critiques littéraires qui ont dû essayer de faire avaler à leurs lecteurs pas mal de couleuvres ces temps-ci pour renier leurs sarcasmes et finalement arriver à le considérer comme un grand écrivain, tu savais vingt ans en arrière que ce type avait un style) : te lever le matin, et écrire quatre heures. Il te semble que si quelqu’un, appelons-le « éditeur », « mécène » ou « idiot ayant envie de dépenser son argent », te procurait suffisamment de revenus pour faire vivre ta famille – ainsi que ta ronde et blanche maîtresse dont il était question au début de cette page – et passer le Carême sous les Tropiques – le froid engourdissant quelque peu ton cerveau –, un tel programme te permettrait de fournir chaque jour une paire de lignes dignes de lecture qui, sans changer le monde ni la vie de personne, pourraient rendre joyeuses quelques dizaines de personnes. Il ne te reste dons plus qu’à être entendu ; tu te feras un plaisir de répondre personnellement à tout individu de bonne volonté.

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